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octobre 2, 2019
Barbara Desborde

C’est la semaine de la Mêlée numérique, et qui dit Mêlée, dit articles dédiés ! Nous nous sommes rendus à une table ronde consacrée au traitement médiatique du mouvement des gilets jaunes, et il y avait à dire. Début du mouvement, surprise liée à son ampleur et surtout déboussolement côté journalistes, tout a été abordé. Mais quelles leçons en ont tiré les journalistes ? Et comment nous qui sommes au cœur de ces questions l’avons perçu ? Brigitte Sebbah, Enseignante Chercheure à l'Université Toulouse 3 et Fabrice Valery, rédacteur en chef adjoint chargé des contenus web à France 3 Occitanie, nous parlent de leur expérience avec franchise et transparence.

Les intervenants durant la table ronde

 

Acte 1 - Les débuts du mouvement : entre curiosité et chamboulement du côté des professionnels de l’information

Rien ne nous préparait à un mouvement d’une telle ampleur. Au départ, une manifestation comme il y en a eu des centaines, déclenchée par la hausse des prix du carburant. A la tête du mouvement ? Personne. Pas de porte-parole, pas de leader, pas de parti politique. Seulement des citoyens, tous différents, qui descendent dans la rue avec leurs propres revendications. Le mouvement est – et restera – très disparate, autant dans les revendications que dans l’organisation : manifestations le samedi, blocages de ronds-points, filtrages de péages, chacun y va de son initiative, le tout étant qu’elle soit entendue. On s’en rend très vite compte, cela va être ardu d’identifier et d’homogénéiser le mouvement. C’est donc, dès le départ, la forme du mouvement qui prend le dessus sur le fond dans les médias, les journalistes parlant essentiellement des blocages et non des causes de ceux-ci. Le fond commencera à émerger plus tard, lorsque l’on prendra conscience qu’il ne s’agit pas d’une simple manifestation mais d’une mobilisation historique.

 

Acte 2 – Un mouvement qui prend de l’ampleur et déstabilise les journalistes

L’une des grandes difficultés du côté des journalistes, c’est justement la disparité du mouvement. Puisqu’il n’y a pas de porte-parole, alors qui interviewer ? Fabrice Valery l’avoue de manière très franche, les journalistes ont pris des (mauvaises ?) habitudes en s’appuyant sur un vivier de sources rarement renouvelé, une élite qui, là, n’a pas les réponses. C’est d’ailleurs tout l’objet des frustrations des gilets jaunes :  ils n’ont, eux, jamais la parole directement et sont toujours représentés par des experts qui ne retranscrivent pas forcément le fond de leur pensée, il est donc urgent de leur redonner un peu de place dans le paysage médiatique. Pour France Télévisions (et de nombreux autres médias), c’est le portrait qui semble être le format le plus adapté afin de mettre en avant ces figures souvent muettes.

Les intervenants ont, du reste, salué le travail de terrain réalisé par certains militants via des Facebook Live, qu'ils ont estimé aussi complets que des reportages de la presse nationale. Cela reste évidemment orienté, mais pas moins un exercice respecté par les professionnels de la presse.

Il existe de nombreuses autres possibilités de replacer le citoyen à la place qu'il mérite, et notamment la prise en compte des commentaires sur les espaces de discussions des médias.

C’est d’ailleurs l’une de nos convictions fortes chez Atchik : pour moins de défiance vis-à-vis des médias, il est indispensable de placer l’internaute au cœur des préoccupations dans les rédactions. On ne cesse de le répéter, la valeur des communautés est immense pour peu que l’on en prenne conscience. Il suffit parfois d’une réponse personnalisée, d’une prise en compte des remarques et suggestions pour faire d’un auditeur/lecteur/téléspectateur le défenseur d’une marque média. Malheureusement, les rédactions perçoivent généralement le coût plutôt que les bénéfices à long terme, alors qu’il est grand temps de saisir l’importance d’un auditoire soigné et convaincu.

 

Acte 3 – De grosses difficultés pour mener leur travail a bien

Certes, Fabrice Valery le dit très bien, les journalistes ont fait des erreurs dans la couverture du mouvement, mais ont également dû faire face à de nombreux obstacles dans l’exercice de leur métier. D’abord, les médias, qui sont rejetés parce que vus comme un tout malgré leurs singularités et sont victimes d’une image « BFMisée » qui nuit grandement à leur crédibilité. Ils sont vus comme relayant la parole de l’état, leur intégrité est donc mise à rude épreuve. D’ailleurs, sur place, ce n’est pas tant le travail des médias qui est critiqué que leur modèle économique : en effet, le fait d’appartenir à de gros groupes, identifiés comme étant proches du pouvoir (parfois à juste titre) est largement décrié par les manifestants.

Deuxième grosse difficulté, devant couvrir à la fois les cassages ayant lieu durant les manifs mais aussi les violences policières, les deux « camps » ont fini par les rejeter complètement. Ils sont donc régulièrement violentés à la fois par les manifestants et par les forces de l’ordre, ce qui rend leur travail compliqué à mener, voire impossible. On ne compte plus le nombre de journalistes blessés durant les manifestations, à tel point que certains n’osent même plus se rendre sur les lieux.

Entre maladresses et rejet, le journalisme a grandement pâti de ce phénomène et a dû, et c’est tant mieux, changer sa vision du métier.

 

Acte 4 – Une réelle remise en question des journalistes ?

On l’aura donc compris, l’image des journalistes a été largement écornée par cette mobilisation. « Infiltrés » par le gouvernement pour les uns, donnant une image biaisée du travail des forces de l’ordre pour les autres, il ne leur est pas facile d’exercer ce métier ces temps-ci. Mais ils en ont tiré des leçons : les citoyens réclament la parole et il est nécessaire de la leur donner. Nous l’avons d’ailleurs constaté dans les commentaires en ligne que nous modérons, une écoute en amont aurait pu permettre de prendre conscience de ce qui se préparait ; il est donc grand temps de replacer le commentaire au cœur de sa stratégie éditoriale pour que de telles frustrations ne se reproduisent pas… en espérant qu’on ne l’oublie pas ?

Barbara

 

 

En 2018, malgré toutes les prophéties alarmistes lorsque tout le monde avait fake news à la bouche, les conversations en ligne n'ont finalement jamais eu autant de valeur. SEO, SMO, dynamique de communauté, retours clients... Il faudra bien plus d'un billet de blog pour lister tous les aspects qui font des conversations la véritable richesse du net contemporain. Pour la seule presse en ligne, l'importance de s'impliquer auprès de son lectorat mérite déjà, en soi, un article entier, alors que la défiance envers les médias traditionnels reste fortement ancrée. Pourquoi faut-il absolument que les rédactions se réapproprient les conversations ? Pour diverses raisons parfois éthiques, parfois techniques, souvent vitales. Explications.

Assises du Journalisme 2018

Voici maintenant deux mois se tenaient les Assises du Journalisme, à Tours, avec pour réflexion centrale "un journalisme utile ?". Parmi les sujets évoqués, signalons en bonne place l'engagement éditorial, la monétisation des espaces ou la place des incubateurs médias, aux côtés du factchecking et de la lutte contre les fake news. Cette bataille titanesque à mener face aux phénomènes de façonnage de l'opinion en ligne tiraille les rédactions et les accapare, entre faits d'armes retentissants et efforts sisyphiens de défense des faits. Au rang des phrases les plus entendues, la plus fataliste a marqué les esprits : "la vérité est devenue une opinion comme une autre". Sans revenir ici sur la notion de vérité, en s'attachant simplement à l'importance, citoyenne comme économique, de défendre du côté des médias l'effort d'établissement ou de rétablissement des faits dans le traitement de l'actualité, une question n'a pas trouvé de réponse. Et c'est bien là que le bât blesse.

 

Cette question, la dernière du colloque "Un journalisme utile, un journalisme de certification" qui tournait autour de la vérification des faits, nous y tenions pourtant beaucoup.

Le factcheching est épuisant mais nécessaire, et ce travail des journalistes mérite d'être mis en valeur. Pour les fréquenter quotidiennement, on sait que les fake news transitent par les commentaires sur les sites et les réseaux sociaux : prévoyez-vous d'intervenir dans ces commentaires pour défendre les articles et lutter contre les intox à la racine ?

Pour être franc, il y eut bien une sorte de réponse, collégiale et diffuse. En substance :

- Alors non, à l'AFP nous n'avons pas de commentaires à gérer donc je ne sais pas trop... mais il me semble que le nombre de commentaires est en baisse et vu ce qui circule, c'est plutôt une bonne nouvelle [NDR : c'est faux puisque les sites se maintiennent et le trafic sur Facebook augmente globalement]. C'était à la mode de regarder les commentaires il y a trois ou quatre ans mais aujourd'hui, c'est peine perdue.
- Nous devons faire un effort de transparence et peut-être poursuivre la discussion mais les journalistes n'ont pas le temps et leur travail premier, c'est de produire l'information.

Si les propos ont été concentrés pour plus de clarté, tous les participants pourront attester de la teneur de la réponse. A tel point qu'un membre de la C.C.I.J.P. (Commission de la Carte d'Identité des Journalistes Professionnels) est venu me voir juste après pour partager sa déception. "Ils sont complètement coupés de la réalité". Une fois encore, nous ne jugerons pas de la vérité ou de la réalité mais en la matière, le terrain vital de l'opinion en ligne n'est que trop peu occupé. Quitte à prendre du temps pour rédiger un article de factchecking rigoureux, fastidieux mais salutaire, n'est-il pas essentiel de le défendre auprès des lecteurs, au niveau des lecteurs ? Car si un article expose des faits, on ne peut ignorer que l'impact des deux ou trois premiers commentaires sur la constitution de l'opinion des lecteurs est considérable.
En clair, en matière de réseaux sociaux, la presse en ligne peinerait-elle à intégrer les dimensions de "réseau" et de "social" ?

 

Un territoire à reconquérir

C'est en effet une impression globale consolidée, au fil de ces Assises, par les réponses lors de l'intervention sur "Un journalisme utile, un journalisme d'engagement". Et partagée par quelques observateurs. Certes, le dernier baromètre de la confiance dans les médias montre une réconciliation avec les canaux traditionnels ; certes, on peut entendre Noël Mamère lorsqu'il fait la démonstration de la futilité des réseaux sociaux ; mais que fait-on pour investir ces espaces au-delà du constat ? Qu'en est-il de la confiance dans les contenus issus des médias traditionnels une fois sur les réseaux sociaux ? De la résistance aux fausses informations ?


En tant que journaliste, comment imaginer détourner le regard de Twitter ou Facebook parce que les échanges n'y sont pas d'une grande qualité ? N'est-ce pas là que sont les lecteurs ? N'est-ce pas là que le service après-vente de la rédaction doit se faire, pour accompagner les articles faits d'infos recoupées et vérifiées un peu plus haut que toutes les intox qui circulent ?


Aujourd'hui, de plus en plus de titres de presse intègrent les community managers à leurs rédaction ; pour la publication des posts sur les différents comptes, c'est parfait ; mais si personne n'interagit avec les internautes, on ne peut pas parler de "gestion de communauté" ni de dimension sociale des réseaux. Facebook, Twitter, Snapchat ou Instagram, dans leur fonctionnement intrinsèque, induisent tous à leur manière un échange, une appréciation, des interactions.

 

Qualité de l'information, cohérence éditoriale

Les réseaux sociaux, dans leur dimension actuelle, ne donnent peut-être pas envie à des journalistes sous pression et découragés par l'affluence de messages haineux, diffamatoires ou relayant des intox ; face à ce ressenti n'oublions pas qu'un outil est avant tout ce que nous en faisons. Si l'on y voit un chantier plutôt qu'un champ de ruines, voici alors ce qui reste à construire :
- La presse locale a l'occasion de consolider son lien - ou de le renouer - avec son lectorat, en valorisant les contributeurs d'intérêt et les témoignages. elle peut, également, distiller de l'information personnalisée à ses lecteurs, presque sur demande, pour renforcer cette proximité.
- La presse nationale n'est pas en reste : dans la bataille de la pertinence, l'écoute du lectorat s'avère une arme précieuse pour tâter le pouls de l'opinion, rechercher de nouvelles sources d'articles et brosser Facebook dans le sens du poil en soignant les commentaires de qualité et les meaningful social interactions, nouvel eldorado du SMO Facebook.

Que demander de plus ? Une augmentation de la qualité des échanges peut-être ? Ca tombe bien :
- En répondant aux internautes, en interagissant avec les commentateurs les plus enrichissants ou en désamorçant les intox et rumeurs à la source, la qualité des échanges augmentera. Pourquoi ? Parce que, pour la même raison que les journalistes, les contributeurs en recherche d'une certaine qualité ont eux aussi déserté les espaces de discussion dans lesquels ils ne se reconnaissent pas. En soignant ces interactions, on permet aux espaces de commentaires d'être à nouveau à l'image de la qualité rédactionnelle du titre de presse.

Oui mais, nous direz-vous, un community manager de presse ne peut pas être au four (les publications) et au moulin (les commentaires sur site et réseaux sociaux). En effet : et c'est pourquoi le rôle du modérateur, qui est avant tout un dénicheur de témoignages, de retours pertinents, de commentaires propices à relancer un article (et donc à augmenter le trafic vers le site...) est si important. Pas un modérateur qui ne fait qu'accepter/refuser ou une machine mais bien un expert des communautés en ligne, fin connaisseur des mouvements de langage et d'opinion sur le web social. C'est l'investissement nécessaire à la valorisation des échanges en ligne, véritable clé de l'image, de la crédibilité et de la visibilité du média.


Si le New York Times fait figure de référence dans sa gestion des commentaires dans le monde entier, ne sous-estimons pas la prise de conscience dans les groupes de presse, y compris régionale, un peu partout. Nous sommes très fiers de compter parmi nos clients la Nouvelle République qui, chaque jour, interagit avec ses lecteurs sur Facebook, ou encore la Provence, toujours à l'écoute des tendances d'opinion exprimées sur la vie locale et des témoignages d'internautes. La réponse est là, palpable : pour rendre son intérêt à une présence sur un réseau social, il faut... En respecter l'aspect réseau et le caractère social 😉

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